Amis pour la vie
Publié le mardi 15 avril 2025
Nos chers disparus ou Nous nous sommes tant aimés...
Homme de cinéma, de télévision, de lettre, de culture, Frédéric Mitterrand a donné à son dernier livre un titre de film pour rendre aussi hommage à ce 7ème art qu'il aimait tant mais surtout aux deux héros, Andrea et Geronimo, dont l'amitié à l'écran s'est prolongé dans la vie. Frédéric Mitterand les a rencontrés tard mais cette relation à distance, épistolaire, emporte le lecteur dans une époque disparue, le rend aussi nostalgique que son auteur.
En trois grands chapitres, le livre Amis pour la vie célèbre la jeunesse, ses rêves fous, l'amitié mais aussi les destins contrariés. L'auteur des Aigles foudroyés, de La Mauvaise vie ou encore de La Récréation évoque tour à tour un ami d'enfance, voisin d'immeuble mais aussi condisciple dans une école de quartier à Paris dans les années 50, un grand oncle militaire de carrière mais dont le talent littéraire aurait du faire davantage sa gloire, tué à 26 ans seulement dans les derniers combats de la grande guerre au pied de la ville de Monastir, et enfin deux garçons, amis à l'écran le temps d'un film mais qui conserveront toute leur vie des liens. Le livre s'achève sur des évocations de Rome, la ville éternelle. Un très beau voyage dans le temps.
Frédéric Mitterand parvient toujours à décrire des sentiments d'une très grande sensibilité en très peu de pages mais avec une infinie variété de termes choisis, profonds et légers à la fois.
Extrait
« Mais quelle est donc cette peine en moi qui vient de si loin et dont le film rallume la douleur ? Les inavouables tragédies de la jeunesse qui sédimentent et grandissent peu à peu pour revenir frapper sans crier gare et de plus en plus fort? J'ai toujours aimé les films qui font pleurer, sous des formes aussi diverses que les grands mélos flamboyants américains, les fictions mélancoliques italiennes, les subtiles chroniques familiales japonaises. La Fièvre dans le sang, La Strada, Voyage à Tokyo, Kazan, Fellini, Ozu et d'autres qui me bouleversent toujours autant. Mais Amici per la pelle c'est encore autre chose, le film au plus près de mon enfance qui raconte une seule histoire de mes histoires. La jeunesse et le charme solaire des deux héros, l'élan qui les porte l'un vers l'autre, la période qui correspond à peu près à celle de ma prime jeunesse, le lycée et les escapades, l'apprentissage des différences sociales, la Rome bourgeoise si proche des beaux quartiers où j'ai grandi, et puis la langue italienne qui m'a toujours enchanté. Tout ce qui ressemble tellement et n'est quand même pas pareil. »