La menace 732
Publié le lundi 04 septembre 2023
Une menace un peu convenue
Une élection présidentielle agitée, une présidente élue de justesse, et déjà des rumeurs de complots d'extrême-droite. Forcément d'extrême-droite. Le décor est planté. Une jeune policière, issue de la diversité, spécialiste des groupuscules extrémistes au sein de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), est chargée de mener une enquête sur les actions violentes d’un groupe d’extrême droite baptisé « Martel 732 ». La démocratie peut-elle être renversée ? La menace vient-elle de l'intérieur ? De l'étranger ? Comment un chef d’état-major des armées et une directrice des services de renseignements peuvent-ils faire face ?
Les premières pages ressemblent à une grosse revue de presse, une compilation d'articles de Libération, le tout recousu à coups de grosses ficelles maculées de bon sentiments. Nous lisons le récit d’une France politique télévisuelle désincarnée. Sur les trottoirs, il n’y a que des militants d’extrême droite à genoux. Les électeurs de la présidente de gauche - forcément de gauche - ne sont même pas décrits. Ils n’existent pas. Pas besoin d'électeurs, ni même de vrais gens, nous plongeons directement au coeur de l'Etat.
La jeune policière feuillette trois dossiers.. ."L'’enquête patinait.». L’auteur use d'artifices. Mais enchaîne vaillamment, exagère la menace. Déjà le Premier ministre parle de créer un Musée de la décolonisation dans le Musée de la légion d’honneur. Or, ce musée existe déjà, c’est celui de l’Immigration, porte Dorée. Autre approximation : un député, fut-il réélu plusieurs fois, même à la Réunion, ne représente pas son territoire (!) à l’Assemblée. A Sciences Po ou à l’ENA, aurait-on des lacunes ? Non, décidément, l’intrigue va trop vite, parait convenue. C’est une démonstration théâtralisée.
Les personnages ? Des filles seules, dynamiques, fortes, intelligentes, racisées. Les garçons ? Soit de jeunes blancs évanescents érotomanes compulsifs soit des brutes bodybuldées aux idées (très) courtes et violentes Les « politiques » ? Une présidente subitement indisponible (le prétexte), une présidente du Sénat sans encrages, sans sénateur, entre un préfet efféminé et un militaire suranné, qui fait un "puputsch" improbable. L'analyse d’un point de vue institutionnel ou politique semble un peu faible et les circonstances s’enchaînent de façon un peu téléphonées. L’explication finale d’un coup d’état organisé de… l’intérieur comme le summum du complotisme, manque de force pour que l'on croit seulement à cette hypothèse.
Mais l'auteur n'est pas sans talent non plus. Il nous fabrique un final cinématographique en trois parties (Sciences Po toujours !) énoncé comme tels : « l’affût, la traque et l’hallali ». Une explication cynégétique dans le décor impressionnant des montages pyrénéennes. De belles pages. Il reste aussi qu'il a su créer un personnage de "flic". Cette jeune policière a de l'avenir. On sait déjà qu'elle sera à l'affiche du second roman de Frédéric Potier. Et ppurquoi pas au-delà ? De quoi imaginer des coups d'Etats plus diversifiés.